Les milieux traditionnellement masculins, Catherine Larabie-Séguin connaît ça ! Seule femme diplômée de sa cohorte en génie civil en 2012, elle a principalement œuvré dans la construction commerciale et la gestion après-sinistre avant de se joindre à l’équipe de Beaudoin Canada en octobre 2020 comme coordonnatrice de projet. En cette Journée internationale des femmes, cette jeune professionnelle assoiffée de projets stimulants nous présente une perspective bien personnelle sur une industrie en transformation.
Q : Catherine, tu es mieux placée que personne pour nous le dire : ça change quoi, l’arrivée d’une femme sur un chantier de construction ?
R : Disons que ça change le ton. Ça apporte une certaine « finition ». Lorsque je me suis installée dans mon bureau (qui était aménagé dans une roulotte neuve en plein chantier), j’ai constaté que tout le monde allait et venait avec ses grosses bottes pleines de boue. J’ai donc demandé qu’on installe un tapis à l’entrée. Après tout, la roulotte est mon lieu de travail et, surtout, la propriété de l’entreprise. Ça peut sembler très banal comme exemple, mais c’est assez représentatif de ce qu’une femme peut apporter de neuf dans un milieu masculin : des solutions logiques, simples et efficaces à des problèmes que personne n’a même pris la peine de remarquer. Inutile de dire qu’aujourd’hui, toutes les roulottes de Beaudoin ont un tapis à l’entrée.
Q : Qu’est-ce qui te plaît le plus dans les interactions avec des collègues masculins et qu’est-ce que tu y apportes ?
R : Je dirais qu’avec les gars, il n’y a pas de chichis : c’est plus franc-jeu. Si on te parle sur un ton sec un matin, on ne prend pas ça « personnel » et on passe à autre chose. Il faut naturellement afficher une certaine force de caractère pour se faire respecter. Pour ma part, je privilégie l’approche candide et collaborative : pour convaincre quelqu’une de la validité d’une idée, il me suffit de sonder la personne ou de lui suggérer que l’idée vient d’elle ! C’est de la bonne vieille psychologie inversée ! Lorsqu’on introduit une femme sur un chantier, la confrontation fait place à la concertation et les rapports s’adoucissent.
Q : Selon toi, les femmes sont-elles appelées à demeurer l’exception sur les chantiers de construction ?
R : De moins en moins. La culture en construction a énormément changé au cours des dernières années, et ce, même dans les rapports entre hommes. D’une part, les entreprises reconnaissent de plus en plus le sens aigu de l’organisation et de l’éthique qu’apportent les femmes dans la gestion de projets et cherchent activement à recruter des candidates. D’autre part, les employés masculins, surtout ceux des nouvelles générations, constatent que pour faire preuve de rigueur, il faut nécessairement faire preuve d’intelligence émotionnelle. Soyons clairs : j’aime les milieux atypiques (c’est mon petit côté « givré ») et je me suis toujours sentie bien accueillie par mes pairs, mais je pense qu’il n’y aura jamais assez de femmes en construction.
Q : En tant que professionnelle évoluant dans un milieu traditionnellement masculin et en tant que maman qui élève une fille et un garçon, quel est ton souhait en cette Journée internationale des femmes ?
R : Qu’on continue à exposer les jeunes à toutes sortes de rôles, de modèles, d’activités et d’avenues scolaires et professionnelles, quel que soit leur genre. L’important, c’est qu’ils se sentent épanouis ! Je suis peut-être la seule femme de ma promotion, mais qui sait : dans le futur, on atteindra peut-être la parité.
Avec la collaboration de Catherine Larabie-Séguin